Brasser sa bière en amateur : la recette de la PILS

Quelle bière allons-nous brasser ?

La PILS est une bière légère et amère, à la robe claire et dorée. La PILS nous vient de République Tchèque et utilise un houblon tchèque, le Saaz. C'est une bière de type LAGER. C'est une bière faible en teneur d'alcool (pas plus de 5%), fraîche et désaltérante. C'est une bière idéale pour brasser sa première bière, car sa recette est simple et en même temps très technique. Elle vous permettra d'avoir une bonne connaissance des principales étapes d'un brassage et d'acquérir une certaine rigueur. Une erreur se verra beaucoup plus sur ce type de bière que sur une stout, qui possède des arômes plus forts et donc plus occultants. Elle a la particularité d'opérer une fermentation basse, c'est à dire à une température entre 5°C et 10°C. La PILS est la bière la plus consommée au monde, vous en connaissez forcément. Vous aurez ainsi très rapidement une idée du résultat de votre recette.

Le matériel pour brasser

  • Une balance : de cuisine, pour peser céréales et houblon
  • Un moulin à malt : il va servir à moudre le malt. Ce matériel n'est pas obligatoire pour brasser sa bière puisque vous pouvez acheter du malt déjà moulu. Aussi, il ne vous permettra pas de moudre de grandes quantités de malt (à moins de vous chopper rapidement une crampe au bras). Il est cependant intéressant si vous souhaitez pousser l'expérience jusqu'au bout, et maîtriser cette étape.
  • Une cuve de brassage : pour votre première bière, je vous conseille d'utiliser une bonne grosse marmite. En plus, vous pourrez l'utiliser pour cuisiner, à moins que vous ne la posédiez déjà !
  • Une cuve de brassage électrique : cette cuve est bien plus pratique, puisqu'elle contrôle la montée en température qui se fait bien plus rapidement que dans une cuve classique.
  • Un thermomètre de cuisine : de cuisine, pas celui qu'on se met dans les fesses !
  • Une cuve ou seau de filtration : c'est un récipient équipé d'une grille de filtration au fond, pour y laisser passer le moût. Le liquide est récupérer par un robinet.
  • Des sachets pour houblon : ce sont des énormes sachets à thé, pour y mettre le houblon et faire infuser à chaud ou à froid.
  • Un serpentin refroidisseur : le moût devra être refroidi rapidement afin d'éviter toute contamination.
  • Un fermenteur : eh oui, pour fermenter sa bière ! Attention de prendre un volume suffisant, sachant qu'il y a de la déperdition entre l'eau de départ (marmite ou cuve) et l'eau à l'arrivée.
  • Des bouteilles de bière vides : que vous pourrez réutiliser.
  • Des bouchons mécaniques ou des capules. Vous aurez alors besoin d'un encapsuleur. L'avantage des bouchons mécaniques est qu'ils sont réutilisables et ne nécessitent pas d'appareil pour les poser.

Les ingrédients pour 20 litres de bière (volume acceptable dans sa cuisine)

  • 4,5Kg de Malt Pilsner : ça sera notre céréale de base. Vous pouvez également remplacer 600g de Malt Pilsner par un autre malt de type Vienna par exemple, ou Cara Pils. Le malt doit être concassé, sinon, vous pouvez le moudre vous-même.
  • Houblon Northern Brewer (20g) et houblon Saaz (30g) : ce sont des houblons amérisants en pellets ou en cônes, plus simples à travailler.
  • Si vous avez du mal à trouver les houblons ci-dessus, vous pouvez utiliser l'équivalent en houblon TETTNANGER (50g), disponible en livraison sur Amazon dans la boutique de AlcoFermBrew.
  • Levure : 2 sachets de 11g. Il est important de choisir une levure de fermentation basse, qui saura travailler entre 5°C et 10°C. Elle relâchera des arôles plus fins et plus subtils qu'une levure à fermentation haute. Vous pouvez prendre au choix : SafLager W34/70 de Fermentis, White Labs WLP 800 Pilsner, Bohemian Lager M84.
  • Si vous avez du mal à trouver les levures ci-dessus, vous pouvez utiliser l'équivalent en Brewferm Lager (sachet de 12g), disponible en livraison sur Amazon dans la boutique de AlcoFermBrew.

Les étapes de fabrication de la bière

1ère étape : l'empâtage

Cette étape est peut-être la plus importante. Le principe de l'empatâge est d'extraire le sucre contenu naturellement dans le malt. Le sucre du malt, ou de toute autre céréale, c'est l'amydon ! L'amydon est un sucre naturel, complexe, car il est composé de plusieurs molécules de sucre. Les sucres complexes nous les connaissons : il s'agit des sucres dits "lents", car ils sont plus longs à digérer, le corps a besoin de plus de temps et de fournir plus d'effort pour casser les grosses molécules. Les sucres rapides sont des sucres déjà cassés, et plus facilement assimilables par le corps humain. Pour la bière c'est pareil : nous souhaitons extrairel l'amydon, puis le casser pour en faire du sucre assimilable par les levures.

Il existe un autre composant présent dans le malt : les enzymes. Les enzymes, ce sont les agents qui vont casser l'amydon. L'extraction de l'amydon, l'activation des enzymes, tout cela se fait à des températures différentes. Ces molécules ont toutes une température d'activation et de travail. C'est la raison pour laquelle l'empâtage va se réaliser en plusieurs étapes ou palliers. Chaque pallier se fait à une température donnée. Une fois la température atteinte, il ne sera plus possible de revenir en arrière, car cela désactivera et tuera l'élément travaillé. Vous obtenez ce que l'on appelle un maïsche : du malt concassé mélangé à de l'eau.

1er pallier : Pallier protéinique : 50°C pendant 10 minutes. Ce pallier consiste à éclaircir la bière. Il consiste à couper et amoindrir l'action des molécules responsables de l'opacité de la bière mais également de la tenue de la mousse. Ce pallier sera à estimer en fonction du type de malt utilisé. Il est même facultatif dans certains cas. Plongez le malt pendant 10 minutes dans 13L d'eau à 50°C.

2ème pallier : Pallier de saccharification : 63°C et maintenez pendant 50 min puis 70°C et maintenez 20 min. C'est lors de cette étape que l'amydon va se casser en molécules de sucres plus assimilables. Deux enzymes vont être activées lors de ce pallier : la bêta amylase et l'alpha amylase. La bêta amylase (environ 63°C) va s'activer à une température inférieuse à celle de l'alpha amylase (environ 68°C). La bêta amylase va transformer l'amydon en maltose, sucre simple fermentescible qui va être transformé en alcool par les levures. L'alpha amylase va transformer l'amydon en dextrine, sucre simple non fermentescible qui va apporter du corps à la bière. En fonction de l'effet recherché, vous pouvez jouer sur les temps d'activation de la bêta amylase et de l'alpha amylase. Ce pallier a pour objectif de transformer tout l'amydon. Il existe un réactif avec de la teinture d'iode. Montez la température de votre maïsche à 63°C pendant 50 minutes, puis à 70°C pendant 20 minutes..

3ème pallier : Palier de désactivation des enzymes ou mash-out. Ce pallier va complètement désactiver les enzymes qui transforment l'amydon. C'est un pallier de sécurité, car il peut rester de l'amydon dans votre maïsche, et les enzymes pourraient continuer leur travail par la suite, et intervenir lors d'étapes qui ne sont pas maîtrisées. Montez la température de votre maïsche à 76°C pendant 10 minutes.

2ère étape : le rinçage

Cette étape permet de récupérer le maximum de molécules de sucres, en séparant le moût des drêches (restes du malt cuit et concassé). Rincez votre maïsche avec 15 litres d'eau à 80°C. Il est très important de ne pas dépasser les 80°C car cela risque d'altérer les arômes de la bière. Concrètement, il vous faut verser de l'eau à 80°C en même temps et aussi vite que votre moût s'écoule par le robinet du bas. Les grains ne doivent pas être exposés à l'air pour ne pas s'oxyder.

Que faire de ses drêches ? Renseignez vous ! Certaines boulangeries les récupèrent pour faire du pain, vous pouvez également les utiliser en cuisine pour faire des cookies (en complément d'une faine de blé classique), des crakers apéritif...

3ème étape : l'ébullition

C'est l'étape où le houblon entre en jeu, et durant lequel il va infuser dans le moût : c'est le houblonnage du moût. Durant cette étape, plusieurs réactions chimiques vont s'opérer : les protéines vont coaguler, le moût va brunir et développer des arômes bien spécifiques (comme ceux du caramel) et enfin le moût va être stérilisé : l'ébullition va tuer toutes les bactéries et micro organismes indésirables. Avant ébullition, vous devriez avoir autour de 25 litres d’eau et une densité de 1,040/10°Plato.

Faites chauffer 25 litres d'eau en prenant en compte l'évaporation. Comptez 4 litres d'eau évaporée par heure. Rajoutez votre moût, portez à ébullition. De la mousse va se former. Certains brasseurs l'écument, d'autre non. Cette mousse va se retrouver au fond de la cuve en fin d'ébullition, et il vous sera possible de ne pas la transvaser dans la bière. Attendez que la mousse disparaisse (entre 5 à 10 minutes), puis commencez le houblonnage. Ne fermez pas complètement la cuve, laissez-la entre-ouverte pour que le sulfure de diméthyle qui provient du malt s'échappe, sans quoi il donnerait un mauvais goût à la bière. L'ébullition va également permettre de récupérer les acides Alpha du houblon. C'est ce qui donne l'amertume à la bière. Le houblon de la PILS est amérisant plus que arômatique, et c'est ainsi qu'il va se travailler. L'ébullition forte et soutenue a pour objectif de tirer toute l'amertume de ce type de houblon. Portez votre moût à ébullition pendant 90 minutes et incorporez le houblon par étapes. Vous pouvez par exemple ajouter 25g de houblon en début d'ébullition, 12,5g 15 minutes avant la fin de l'ébullition, et 12,5g en fin d'ébullition.

4ème étape : le refroidissement

Cette étape n'est pas à négliger et est assez technique. Il s'agit de refroidir rapidement votre bière grâce au serpentin refroidisseur. Cette étape doit refroidir votre bière à 12°C. Il faut connecter le serpentin à une arrivée d'eau et plonger le refroidisseur 5 minutes avant la fin de l'ébullition pour le stériliser. Les serpentins d'immersion sont plus simple à entretenir que les refroidisseurs à plaque et permettent un refroidissement rapide et efficace. Le refroidissement doit être le plus rapidement possible pour éviter l'oxydation du moût. En effe, le diméthylsulfure (DMS) continue à être généré malgré l’arrêt de l’ébullition, ce qui pourra entraîner un faux-goût dans la bière.

5ème étape : la fermentation

Nous y voilà ! Nous allons enfin pouvoir appeler notre moût de la bière ! Une fois que le môut est à température indiquée sur le sachet de levures, ensemencez-le. Soyez très précautionneux à cette étape (mais aussi à toutes les autres). Tout le matériel que vous utilsiez doit être soigneusement nettoyé et stérilisé pour ne pas infetcer votre bière. Cela vaut même pour la paire de ciseaux utilisée pour ouvrir le sachet de levures. Laissez la fermenter pendant au moins 2 semaines (3 semaines idéal) à 11°C / 12°C (le mieux étant d'avoir un réfrigérateur dédié). La fermentation est terminée lorsque la densité de la bière reste stable sur 4 jours de suite. Elle doit être de 1.013 voire 1.014. Coupez le réfrigérateur, et laissez-le remonter jusqu'à 16°C.

Une astuce en fin de fermentation : effectuer un refroidissement très progessif de la bière (1°C par jour), jusqu'à atteindre les zéro degrés. Ainsi les levures stopperont leur activité progressivement en laissant moins de résidus derrière elles.

6ème étape : la mise en bouteille

Enfin ! Voici enfin votre bière ! Mais il vous faudra encore patienter un peu, et la conserver 4 semaines supplémentaires. Comptez 6g/L de sucre lors de l'embouteillage. C'est ce sucre qui va apporter le gaz carbonique dans votre bière. C'est la carbonation. Diluez votre sucre dans un peu d'eau portée à 80°c (40cl par exemple), laissez refroidir, puis ajoutez-le à votre bière, avant de le verser en bouteille.

Evitez l'infection de votre bière

C'est le pire qui puisse arriver : que votre bière soit infectée. Pour cela, pensez toujours à laver et stériliser votre matériel. Tout doit y passer : cuves, serpentin, bouteilles, capsules. Faites-le au dernier moment,afin que le matériel ne reprenne pas la poussière. Aussi, lavez le matériel après usage (je pense aux cuves, serpentin) pour éviter que le moût ne colle aux éléments. Chaque élément devra donc être nettoyé deux fois : une fois avant utilisation, et une fois après utilisation.